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La légitime défense des habitants des lieux a balayé le projet dément venu d'ailleurs. Les petits, nombreux, ont gagné contre les grands, isolés. La ténacité a payé. La raison l'a emporté.

 

C’est certain à présent  : Il n’y aura pas d’éoliennes géantes sur le Puy de l’aiguille, à proximité de tous les sites classés et inscrits qui composent la trame singulière du pays de Gimel.

Après le jugement du tribunal administratif de Limoges (qui avait rejeté son projet) la société RES avait deux mois pour exercer un recours devant la Cour administrative d’appel de Bordeaux. Elle s’est abstenue de le faire. Par conséquent, cette décision est définitive, incontestable.

Un projet nocif, non seulement parce qu’il était massivement impopulaire mais aussi parce qu’il était contradictoire au droit, notamment au Code de l’environnement, est ainsi écarté de façon irrévocable. Déjà notre ciel est dégagé : le mât de mesure de 100 mètres de haut installé depuis 2015 sur le Puy de l’aiguille a été démonté.

Le ciel de Gimel est sauvé. Savourons notre joie légitime. Et n'oublions pas que c'est principalement à la mobilisation citoyenne, associative que nous devons ce succès.

Cette victoire est aussi précieuse car elle est un avertissement à tous les adorateurs du vandalisme paysager qui sévissent ou envisagent de sévir en Corrèze. Qu'ils entendent bien : « ATTENTION ! ICI, PAYS DE GIMEL : CORREZIENS VIGILANTS, INFORMES, MOBILISES ! »

 

Pour mémoire, car les luttes, qu'elles perdent ou qu'elles gagnent, doivent avoir de la mémoire, nous reproduisons ci-dessous le texte de l’intervention de Didier Peyrat à la réunion publique organisée par DRPG le 2 septembre 2017 à Gimel les cascades. Il traçait les grandes lignes d’une lutte qui aura duré des années. Et qui a fini par avoir gain de cause.

« Bonsoir.

Nous avons travaillé, étudié le dossier présenté par la société RES. Nous avons passé des heures à fouiller dans un millier de pages, manifestement conçues pour ne pas être lues… Nous avons pris du temps, et peut-être même un peu de retard. Nous pensions qu’avant de crier, il fallait s’informer et réfléchir.

Nous le pensons toujours.

Mais quand même, aussi, nous crions.

Doucement, calmement, sans outrance, nous protestons contre ce projet démentiel.

Et ce refus est un refus tout à la fois de la raison et du cœur.

Nous sommes tous des bénévoles. Dans cette histoire, nous n’avons rien à gagner sauf peut-être la fierté discrète de contribuer à défendre NOTRE Gimel, les vivants et les morts d’ici, et ainsi de suivre un chemin qui a été tracé il y a longtemps par nos ancêtres, relayé par nos anciens, que nous saluons, un chemin que nous voulons garder ouvert pour nos enfants…

RES est une grosse société, filiale d’un groupe anglais présent sur plusieurs continents.

Gimel est un village modeste. Sa renommée, car elle existe, il la gère avec patience, obstination et sans beaucoup de moyens.

Mais Gimel est un village chanceux, quand même. Un petit miracle façonné par la nature et les hommes. Gimel est un village où il est possible encore de trouver quelque chose qu’il n’y a pas ailleurs, où il est possible de ne pas tomber au coin d’un chemin de randonnée nez à nez sur certaine choses assez moches qu’on voit ailleurs…

Un havre, aussi, où peuvent se guérir les blessures de la vie. Il y a les choses, et il y a les hommes. Tout entremêlé. On part de Gimel, on y revient. On profite de Gimel, sans y penser, et puis vient le jour où on y repense. Et on se rend compte que Gimel, c’est petit, certes, mais c’est grand, aussi. Que ce village sans importance peut devenir prépondérant. Que le paysage n’est pas qu’un décor agréable, qu’il est bien plus que cela : que le paysage est à l’extérieur, mais aussi à l’intérieur de nous.

Bon, voilà : eux, ils débarquent, et ils s’apprêtent à briser cela. A nous infliger une plaie, à coloniser notre ciel, à brusquer notre mémoire.

Donc on crie. Et on va crier encore plus fort.

Mais on argumente, aussi.

Les dirigeants de la société qui porte ce projet, ceux qui le soutiennent ne sont pas des fous. Ce sont des gens intelligents, habiles, nous les respectons et ne les sous-estimons pas. Mais tous ces moyens, tous ces cerveaux bien faits, toutes ces stratégies de communication se sont mis au service d’une entreprise objectivement démentielle.

Car démence il y a dans la volonté d’aller visser sur le Puy de l’Aiguille 3 pieux (« d’acier ou de béton »), trois aérogénérateurs géants.

Pourquoi ?

  • Gigantisme (180 mètres de haut en bout de pales) 
  • Atteinte aux sites protégés
  • Déchirure infligée aux paysages remarquables
  • Offense à la mémoire des lieux

Nous ne sommes pas dans l’esprit de système anti-éolienne, du tout, nous faisons objection raisonnable à un projet précis, totalement déplacé là où il est programmé.

Le point important, c’est de trouver dans le projet RES l’extraordinaire aveu : ils veulent « créer un nouveau paysage » avec ce parc éolien industriel. C’est expliqué noir sur blanc dans leur dossier de projet…

« Le motif éolien implanté sur le Puy de l’Aiguille peut redonner une force de lecture au Puy de l’Aiguille en le signifiant plus clairement comme point de repère au sein du paysage et des perceptions lointaines. »

Créer un nouveau paysage ?  Vraiment ? C’est donc que l’ancien ne convient pas, qu’il a fait son temps ? Que le nouveau paysage doit se substituer à l’ancien, qui va glisser dans le néant ?

Voyez comme on nous parle :

« Le Puy de l’Aiguille répond à ces deux critères : en tant que relief culminant, le Puy est un support adéquat pour révéler une échelle des lieux au sein du plateau et il est sémantiquement compatible pour recevoir des machines à capter le vent ; et l’ajout du motif éolien peut concourir à appuyer et à signifier le seuil du plateau le long du parcours de la RD 978. »

Eh bien, non. Nous ne voulons pas que disparaisse, maintenant et ici, ce paysage-là. Nous acceptons les transformations. Rien n’est immobile. Rien n’est perpétuel. Mais, aux démiurges de RES qui se croient légitimes et compétents pour prendre la place des dieux et des cieux en « créant » des paysages, par « ajout de motifs éoliens », nous rappelons qu’un paysage, ca ne se créée pas d’un coup brusque, avec un volontarisme brutal : ca met des siècles, oh oui ca bouge, certes, mais lentement, par l’action patiente des éléments naturels, par l’intervention humaine étalée sur des générations. Ca ne se viole pas, un paysage.

La Corrèze est un département qui a de grandes ambitions touristiques. Nous avons en effet des trésors à partager. Il faut trouver un arrangement entre la protection de ce qui existe et l’invention de choses nouvelles. Il faut trouver une médiation entre l’ancien et le neuf.

Ce n’est pas ce que veut faire RES. Ils veulent étouffer l’ancien sous le neuf.

L’ancien, ne doit pas disparaître, pas partout. Sinon, quoi ? Ce sera une entreprise d’homogénéisation généralisée. Si le pays de de Gimel finit par ressembler à tant de lieux défigurés par une "modernité" non maîtrisée, que va-t-il se passer ? On nous aura abîmés, nous, et en plus les gens passeront leur chemin car ils viennent précisément ici pour retrouver quelque chose qu’il n’ont pas ailleurs.

C’est pourquoi nous avons RAISON de nous battre AVEC NOTRE CŒUR contre ce projet.

Aidez-nous, aidons-nous.

Je vous remercie."

 

 

Tag(s) : #Eoliennes industrielles à Gimel
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